Réponse à Alain Accardo. 33ème Congrès du PCF
A. Sur la direction du Parti. Il est légitime de critiquer ses hésitations, son esprit d’accommodement ou un certain manque de rigueur conceptuelle, mais on ne peut soupçonner ni sa sincérité ni sa bonne volonté. En fait il s’agit moins d’un problème de direction que d’ impuissance généralisée face à une situation inextricable. Comme nous tous la direction du PCF se trouve devant une aporie: il n’y a pas de majorité de gauche possible sans le PS; il n’y a pas de politique de gauche possible avec le PS.
Le mot de « clique » est un peu déplaisant et ne me semble surtout pas très judicieux. Je ne suis pas un fan de Marie-Georges Buffet. Elle n’a certes rien d’une pasionaria et je ressens souvent de l’agacement à l’écouter. Elle n’a peut-être pas une personnalité éblouissante et manque sans aucun doute de charisme mais je la crois honnête et travailleuse, scrupuleuse et ouverte à la discussion. Elle ne se prend pas pour un aigle de la pensée (une modestie dont quelques leaders de la gauche dite antilibérale qui n’en sont pas davantage (des aigles) feraient bien de s’inspirer), elle fuit les paillettes (ce qui n’était pas le cas, par exemple, d’un Robert Hue), elle n’est pas très médiatique (ce que, personnellement, j’aurais tendance à mettre à son actif). Ce n’est pas la plus mauvaise Secrétaire générale qu’on ait pu avoir... Et aussi peu autoritaire! A ce propos le complot qui aurait été ourdi pour écarter des débats le texte « Remettre le PCF sur les rails... » est, à l’évidence, une plaisanterie. Rarement une direction aura été aussi faible et peu directive.
Le texte que j’ai combattu était, pour l’essentiel, l’œuvre des « Refondateurs » (surtout) et de ce qu’on appelle les « amis de Robert Hue ». M.-G. B. s’y est rallié à la fois par faiblesse théorique et par souci de conciliation. Je n’ai pas été le seul à m’interroger sur ce texte et j’ai constaté, avec même une certaine (heureuse) surprise, que le congrès l’avait sensiblement gauchi sur un certain nombre de points.
B. Sur le congrès. Voici à titre d’exemples quelques modifications apportées sur des points que j’avais soulevés (avec d’autres).
1. La notion de « rébellion contre les élites » a été heureusement écartée de la liste des« confusions et régressions idéologiques ». Dans cette liste était également mentionné le« vote FN ouvrier ». Ma section avait considéré que cela stigmatisait de façon abusive le « vote ouvrier » (celui-ci continue toujours à se caractériser plutôt par l’abstention: voir Annie Collowald). Nous avons eu gain de cause et il est parlé, de manière à notre avis plus juste, de « vote FN dans les couches populaires »
2. Je m’étais insurgé contre la phrase: « les luttes de classe ont pu favoriser des conquêtes sociales ». elle est devenue: « les luttes de classes ont imposé des conquêtes sociales ». De même, la phrase: « des acquis sociaux sont souvent le fruit des luttes de classes » est modifiée en « des acquis sociaux sont le plus souvent le fruit des luttes de classes ».
3. Je critiquais l’utilisation de la notion d’ « Etat providence » dans la phrase: « Ainsi du lendemain de la Seconde guerre mondiale aux années soixante-dix son développement (du capitalisme) a intégré le principe de l’Etat providence, notamment en Europe de l’Ouest ». La phrase a été complètement transformée en: « Ainsi du lendemain de la Seconde guerre mondiale aux années soixante-dix, son développement a dû concéder aux luttes populaires d’importantes avancées sociales et des formes d’intervention publique dont il s’emploie aujourd’hui à se débarrasser »
5. Quant à la notion de "dépassement" que je juge insuffisante, il semble qu'elle soit désormais consacrée. Il est vrai qu'il s'agit d'une des rares notions qui ait été conceptualisée. C'est Lucien Sève qui en a fait la théorie, précisant, par exemple:"dépasser n'est pas exclusif de supprimer, mais l'inclut au contraire dans une vision bien plus pertinente de la transformation historique" (Huma, 25 mars 2006). Bon.
Ces rectifications dans un texte de congrès peuvent paraître anecdotiques. Pour ma part, connaissant le sérail, je les juge significatives. Il reste certes beaucoup à faire. Le débat se poursuit et, sans illusions excessives, il mérite d'être mené.
Réponse à Alain Accardo à propos du 33ème Congrès du PCF, 29 juillet 2006