Un projet ultralibéral

Excellent éditorial de Patrick Appel-Muller le samedi 21 octobre dans l’Huma. Cependant, les actes du ministre de l’intérieur ne me semblent pas relever d’une simple « surenchère » ou d’une « dérive » -comme il a été dit au Congrès du PCF- sécuritaires. De même parler d’une « vision policière de la société » me paraît réducteur pour ce qui est un véritable projet de société. Sarkozy, bien sûr, s’inspire du modèle américain, comme le note Patrick Appel-Muller, et ce n’est pas sans raisons qu’il est allé faire allégeance à Bush. Mais surtout, il se place dans la droite ligne de la révolution reaganienne ultralibérale où le massacre de l’Etat social (que l’on appelle en Europe « réforme ») va de pair avec le développement continu de l’Etat pénal, tout abaissement du premier étant corrélatif d’un renforcement du second. Et le tout se fonde sur la vulgate libérale de la « responsabilité de l’individu » à laquelle se sont d’ailleurs ralliés la plupart des dirigeants socialistes. Ainsi le chômage, la délinquance, la misère seraient des choix rationnels et calculés de l’individu: le pauvre aurait « choisi » d’être chômeur, le délinquant aurait « choisi » d’enfreindre la loi, le SDF aurait « choisi » d’être à la rue. Ayant ainsi exercé leur libre-arbitre, ils devraient s’attendre à supporter les conséquences méritées de leurs choix. Le sarkozysme, l’air de rien, c’est un humanisme!

(Courrier au journal l'Humanité, 23 octobre 2006)