L'écologisme, c'est vendeur
La meilleure preuve de l’imposture de l’écologisme, c’est la facilité avec laquelle le capitalisme en a récupéré les thèmes. Comme le dit crûment tel PDG, le seul problème de l’entreprise c’est : « comment s’adapter à ce changement de paradigme (la préoccupation environnementale) pour continuer à être performant et rentable» (Dan Vogel, le Monde, 12.12.2009). Le souci « écologique » du capitaliste sera avant tout utilitaire, superficiel et à court terme. Le pouvoir des mots étant ce qu’il est, il suffira d’affubler des préfixes « bio » ou « éco » le nom de n’importe quelle cochonnerie et ce sera vendeur. Nos écologistes officiels voient ainsi avec ravissement fleurir des dénominations dont la seule énonciation suffit à leur bonheur : « capitalisme vert », « croissance verte », « bio-capitalisme », « éco-business » ou, mieux, « greenbusiness », sans parler de l’inénarrable et déjà ringard « développement durable », etc. Autant d’escroqueries qui ne trompent que ceux qui le veulent bien et qui se laisseraient volontiers séduire contre espèces sonnantes et trébuchantes. Au sommet de Copenhague on a peu parlé de ce curieux « village vert » des lobbyistes et industriels reconvertis en capitalistes verts (l’Humanité, 18.12.2009). Pour le capitalisme, tout s’achète et tout se vend, les consciences comme les expertises. Aux Etats-Unis, les laboratoires pharmaceutiques rétribuent des parlementaires pour combattre la réforme par Obama du système de santé. En France, la plupart des experts commis à l’autorisation de mise sur le marché des médicaments sont également liés aux laboratoires pharmaceutiques (souvent les mêmes!). Et on sait que toute épidémie est une aubaine pour les multinationales du médicament, enrichissant leurs actionnaires et transformant les virus en or (Bernard Doray, l’Humanité, 11.01.2010). Quant à ces proximités entre argent, élus et experts, pour les pays pauvres on parlera avec indignation de corruption, pour les pays riches on parle noblement de lobbying. J’attends qu’on m’explique la différence!
L’écologisme dominant accepte, quand il n’y pousse pas, que l’environnement soit considéré comme une marchandise sous prétexte de le protéger. Le droit de polluer est institutionnalisé, le business vert se répand. On l’a vu, le marché des quotas d’émission de CO2 prospère et l’on apprend maintenant, selon le journal le Monde, que « le sauvetage des forêts tropicales est déjà un marché » (18.12.2009) et que « la nature se met à l’heure de la finance » (10.03.2010). Figurez- vous que les marchés financiers s’intéressent soudain à la biodiversité. C’est sans doute la fameuse main invisible qui met en place un marché des crédits des « actifs naturels » (c’est comme ça que ça s’appelle!) où l’on pourra se procurer un crédit comme « compensation » pour la « consommation » d’un espace naturel. Autrement dit, on pourra acheter le droit de détruire tant d’hectares de zones humides, telle étendue d’habitat d’espèces rares en versant une compensation dont on aura calculé qu’elle n’empêchera pas de dégager un profit substantiel.
Et de combien de tromperies de ce genre l’écologisme se fait-il encore le complice? La fable des « biocarburants » en est une. Fidel Castro, le premier, avait signalé, il y a des années, que cela mettrait en danger les ressources alimentaires. On s’était moqué de lui. On y est. De plus la déforestation intensive pour cultiver soja, colza, etc. sur d’immenses étendues donne un bilan de pollution CO2 négatif. Le biodiesel à base de colza a ainsi un bilan deux fois plus mauvais que le gazole qu’il est censé remplacer. Mais certains y trouvent leur compte. L’écologisme à courte vue encourage par ailleurs un véritable néocolonialisme sous prétexte d’énergies renouvelables. Le pillage des espaces des pays dits du Sud s’accentue. La bonne conscience capitaliste occidentale y exporte ses modèles bien pensants, comme depuis toujours, avec des « pratiques d’évangélisation » (Frank Boutté, Sud-Ouest, 23.12.2009) dignes du pire colonialisme. Un exemple : les paysans mexicains, dans l’Etat d’Oaxaca, combattent le business vert qui couvre leurs espaces de fermes éoliennes dont les hélices s’étendent à perte de vue. Leur installation a détruit les systèmes d’irrigation, rendant le sol inutilisable pour le bétail et la culture, comme à Juchitan (voir www.bastamag.netwww.bastamag.net ). Les populations perdent le maïs et ne retirent rien des investissements faits chez elles par les multinationales. Elles sont contraintes par des contrats et des baux abusifs de 30 ans renouvelés automatiquement ce qui revient à un abandon des terres pour 150 pesos (8 euros) par hectare et par an avec 50 euros à la signature du contrat tandis que les profits sont rapatriés dare dare vers l’Allemagne, l’Espagne, le Danemark... Si ce n’est pas de l’exploitation écolo-coloniale! De l’écolonialisme! Et ce n’est pas tout...
15 mars 2010