Prospérité de l'écolonialisme
L’écolonialisme perpétue le pillage colonial des pays dits du Sud sans ce que cela émeuve particulièrement nos écologistes officiels, bien pensants et surtout bien installés dans une agitation dérisoire qui leur fait prendre la « vélorution » pour la Révolution. Qu’ils demandent donc au Mouvement des Sans Terre brésilien : on parle là d’un véritable processus de recolonisation. La monoculture de la canne à sucre, pour les agrocarburants, dans les états côtiers comme le Nordeste, repousse les immenses champs du soja destiné au bétail européen et nord-américain vers l’Amazonie dont les tartuffes déplorent la déforestation. Les mêmes répandent le honteux mensonge du « bio- carburant », un mot qui ne veut rien dire et qui n’est qu’une astuce de marketing pour tromper les sots. Il s’agit d’agrocarburants qui mobilisent de gigantesques plantations aux mains de grands propriétaires et de multinationales qui concurrencent directement, comme au Guatemala, l’agriculture vivrière traditionnelle. Nadia Djalali explique : « les paysans sont expulsés, parfois très violemment, et les cours d’eau détournés. Au Nord-Ouest de la Colombie, où la guerre de l’huile de palme fait rage, les petits paysans vivent depuis une dizaine d’années sous le régime de la terreur. Les populations sont évacuées de force de leurs terres ou assassinés par les paramilitaires pour que des firmes y fassent pousser des monocultures d’huile de palme converties ensuite en agrocarburant » (« Agrocarburants : bienvenue dans l’enfer vert », www.bastamag.netwww.bastamag.net ).
Assez d’hypocrisie, il est plus facile de s’en prendre au nucléaire que de mettre en cause le productivisme agro- industriel insensé destiné à fournir les pays riches en carburant non polluant pour eux (et encore!) alors qu’il est une catastrophe écologique pour les pays pauvres. Le « biodiesel » extrait du palmier à huile, dans des tourbières, en Asie du Sud-Est, répand deux à huit fois plus de CO2 que le diesel de pétrole (Nadia Djalali). Au Brésil, la fabrication de l’éthanol produit dix fois son volume de déchets liquides qui vont polluer les nappes phréatiques (Mélina Merlino, « Agrocarburants versus réforme agraire au Brésil », www.iteco.be ). Toujours au Brésil, la déforestation plus l’utilisation intensive des machines agricoles produisent 80% des émissions de gaz à effet de serre... Merci Lula! Les conséquences sociales ne sont pas moins graves et l’on voit se reconstituer dans ces pays ce qu’on appelle l’économie de plantation, fleuron du système colonial fondé sur une monoculture intensive d’exportation. L’esclavage en était le mode d’exploitation de la force de travail. Aujourd’hui on a des sociétés hyper hiérarchisées caractérisées par la violence des rapports de domination. Comme aux plus beaux temps de la United Fruit nord-américaine, les multinationales entendent y régner sans partage. La gauche latino-américaine s’y oppose avec un certain succès. On comprend pourquoi les élites occidentales, à l’image d’un Alexandre Adler, poursuivent de leur haine les Chavez, Moralès ou Correa.
L’agrobusiness prospère, quant aux écologistes brevetés, en France, ils s’occupent de choses autrement plus sérieuses : ils causent de « coopérative politique ». On connaît la sinistre légende selon laquelle le capitalisme aurait permis d’éradiquer la faim dans le monde : la FAO annonce que la crise alimentaire des années 2007 et 2008 a réduit à la famine 925 millions de personnes! Le chiffre devrait être de 1,2 milliard en 2017 (Esther Vivas, « Les contradictions du système alimentaire mondial», www.legrandsoir.infowww.legrandsoir.info ). En réalité, le capitalisme mondialisé, dans sa forme néolibérale, a détruit les sociétés des pays du Sud sous couvert d’y installer la démocratie et « les biens communs comme l’eau, les semences, la terre qui, depuis des siècles appartenaient aux communautés ont été privatisés, spoliés des mains du peuple et transformés en une monnaie d’échange à la merci du plus offrant » (Esther Vivas). Sous couvert de développement et de remboursement de la dette, le FMI, l’OMC, la Banque mondiale ont installé une misère encore plus profonde pour le plus grand nombre tout en suscitant la formation d’une classe moyenne comme intermédiaire colonial, telle la bourgeoisie compradore d’autrefois, permettant d’extorquer la plus-value des pays exploités à coup de « programmes d’ajustement structurel » comme dit la répugnante terminologie technocratique : suppression des subventions aux produits de première nécessité comme le riz ; réduction impitoyable des dépenses publiques ; dévaluation des monnaies pour faire baisser le prix des produits exportés ; relèvement des taux d’intérêt pour attirer les capitaux étrangers... Une des conséquences de cette exploitation forcenée, c’est, aujourd’hui, l’empoisonnement de la planète!
29 mars 2010