Carte scolaire, élitisme et mixité sociale

Que de confusion, voire d'hypocrisie, dans le débat sur la carte scolaire! Le principe de la carte scolaire n’est pas, à l’origine, une volonté de préserver ce que l’on appelle aujourd’hui la « mixité sociale ». Il n’est qu’une application du mythe de l’égalité républicaine devant l’école: il suffit de mettre tous les enfants dans les mêmes murs et la méritocratie fera le reste. Il s’agit donc d’orienter tous les enfants d’un même secteur géographique vers le même établissement scolaire. Egalité toute relative: la population scolaire n’étant que le reflet de la population du quartier, bourgeois ou populaire, le respect de la carte scolaire n’a jamais empêché le tropisme méritocratique de générer des inégalités scolaires reproduisant et légitimant, pour l’essentiel, les inégalités sociales.

Mais, apparemment, ce n’est pas assez. On sait que, sous les nobles auspices du "libre-choix", l’obsession de l’élitisme scolaire conduit de nombreuses familles des classes moyennes et supérieures à contourner le dispositif de manière à trouver le « bon » établissement permettant à leurs chères têtes blondes d’être préservées de l’influence supposée délétère des enfants des classes populaires, surtout quand ceux-ci sont plus ou moins bronzés. Une réponse authentiquement républicaine face à cette situation serait de prendre des mesures contraignantes visant à assurer, malgré ses insuffisances, le respect intransigeant d’une carte scolaire révisée comme garantie minimale de cette mixité sociale que l’on dit souhaiter. Mais point du tout: un principe est bafoué? Supprimons le principe! Cela me paraît d’une moralité politique douteuse.

Courrier pour le journal Sud-Ouest, 14 juin 2007