Des économistes bien nourris V

Pour en terminer avec le recensement de ces économistes officiels acquis à des intérêts particuliers tout en étant censés définir l'intérêt général, on mentionnera quelques seconds couteaux qui, pour être moins visibles que les précédents, n'en sont pas moins malfaisants. Ainsi, au CAE, M. Jacques Despla, présenté comme « consultant », est « Senior Advisor » à BNP-Paribas après avoir été chef économiste à Europe Barclays Capital. C'est un ultralibéral virulent dont le credo est la concurrence à tout prix et la « fin des privilèges ». Quels privilèges ? L'assurance chômage qui « incite à la fainéantise » ou la fonction publique et « son emploi à vie » (Alternatives économiques, avril 2007). Sans commentaire.

M.Michel Didier a été Directeur général de Coe Rexecode, anodinement présenté comme un Institut privé d'études économiques. C'est, en fait, une officine patronale, ennemie acharnée des 35 heures et spécialiste de l'erreur de calcul et de la manipulation des chiffres. En voulant à toute force démontrer que la durée annuelle du travail était moins élevée en France qu'en Allemagne (c'est le contraire), Coe Rexecode a même commis un faux ainsi que l'atteste le site Eurostat de la Commission européenne (www.agoravox.fr). M. Augustin Landier pourfend l' « antilibéralisme » français. Il est professeur, avec nos impôts, à la Toulouse School of Economics, ce qui ne l'a pas empêché de créer son propre hedge fund. Rappelons que les hedge funds sont des fonds hautement spéculatifs, peu ou pas réglementés et qui pratiquent, par exemple, entre autres acrobaties financières, la « vente à découvert » qui consiste à vendre des titres que l'on n'a pas ou pas encore. Escroc mais pas trop. Mme Mathilde Lemoine est Directrice des Etudes économiques et de la Stratégie Marchés à HSBC France . Sait-on que cette banque britannique a été fondée en 1865 par un Ecossais pour financer le trafic d'opium. L'argent n' a pas d'odeur.

Au Cercle des économistes, Mme Laurence Boone est Professeur à l'ENS de Cachan. Quand elle a le temps, car, après avoir été chef économiste à Barclays Capital, elle a été transféré avec la même fonction chez America Merril Lynch. On ne sait pas si elle est toujours au CA de Pinault- Printemps-Redoute. M. Anton Brender, modestement présenté comme professeur associé à Paris- Dauphine, est tout de même chef économiste -c'est fou ce qu'il y a comme « chefs »- à Dexia Asset Management. M. Dominique Roux, également professeur à Paris-Dauphine, est, en même temps, président de Bolloré Télécom, une société bien en cour, on le sait et, bon sang ne saurait mentir, père de Valérie Pécresse, encore ministre du budget, que l'on voit mal agresser le gagne-pain de son papa. M. Bertrand Jacquillat, professeur à Sciences Po, se contente d'être administrateur à Total et à Klépierre, une société d'investissement immobilier. Il s'est penché sur la question et proclame que les membres, comme lui, de conseils d'administration, n'attendent pas après les jetons de présence pour vivre. A la bonne heure, on est content pour eux! Et ils sont sans doute prêts à jurer, la main sur la cœur, qu'il serait indigne d'eux de pratiquer le mélange des genres. Mais comment M. Jean- Michel Charpin, présenté comme un expert indépendant, pouvait-il oublier qu'il était membre du Comité de direction générale de la BNP lorsqu'il préparait le rapport criminel qui a porté le premier coup au régime français des retraites ?

Ce panorama est loin d'être complet et l'article cité du Monde diplomatique montre, par exemple, comment l'Autorité des marchés financiers (AMF) chargée de leur « régulation » est composée d'hommes des banques qui n'ont aucun intérêt à la dite régulation : Olivier Davanne (Groupama), Olivier Garnier (Société générale), Ruben Lee (Oxford Finance Group), Artus (Natixis), etc. Tous ces professeurs ou experts, quels que soient les masques qu'ils se donnent, ne sont que des mercenaires qui ne sauraient être indifférents, c'est un euphémisme, aux intérêts des sociétés qui les arrosent : les banques, BNP, Rotschild, Lazard, Barclays, Hervet, Neuflize, Natixis, Société générale, Crédit agricole, Merril Lynch, les assureurs, Euler-Hermès, Allianz, les entreprises, Total, IPSOS, Ernst et Young, Bongrain, etc. Il leur suffit alors, ô miracle de la science ! d'accommoder la théorie qu'ils professent aux intérêts qu'ils défendent...

26 mars 2012